Actions & Protection

Nidification des hirondelles à Bruxelles en 2023

Un printemps 2023 providentiel pour deux espèces d’hirondelles dans la capitale. En effet, les recensements effectués aux mois de juin et juillet dernier sont extrêmement réjouissants pour nos voltigeuses. Les Hirondelles de fenêtre Delichon urbicum ont connu un déclin important à Bruxelles dans les années 1980 jusqu’au début des années 2000. Grâce aux efforts conjoints de multiples acteurs publics, privés et volontaires des aménagements ont pu être faits pour favoriser la nidification de l’Hirondelle de fenêtre et de l’Hirondelle de rivage Riparia riparia en Région bruxelloise. Aujourd’hui, et après plusieurs années, ces efforts semblent porter leurs fruits avec un retour remarquable de ces migratrices. Une population d’Hirondelle de rivage s’est installée à Bruxelles depuis 2021 et les différents sites de nidification, naturels et artificiels, sont largement investis par les deux espèces.

Ces formidables résultats seront repris dans l’Atlas des Oiseaux de Bruxelles (2022-2024), en cours depuis le printemps 2022. Pour rappel, ce projet a pour mission de faire un tour du paysage presqu’exhaustif de l’avifaune bruxelloise et d’ainsi connaître les espèces nicheuses et hivernantes présentes en Région Bruxelles-Capitale (effectifs et abondances). Une partie de ces résultats sera comparée à ceux de l’atlas précédent (2000-2004) afin de mettre en lumière les dynamiques des populations d’oiseaux dans la ville. Ce projet ne serait rien sans le travail remarquable des volontaires ornithologues impliqués. Si vous aussi si vous souhaitez vous investir pour la dernière saison à venir et mettre votre pierre à l’édifice, n’hésitez pas à nous contacter !

L’Hirondelle de fenêtre

Bien reconnaissable en vol grâce à son croupion blanc, on peut l’observer à Bruxelles dès le mois d’avril alors qu’elle revient de ses quartiers d’hiver au sud du Sahara. En ville, cette hirondelle porte bien son nom en maçonnant son nid en boue sous nos corniches et embrasures de fenêtre. Les hirondelles de fenêtres nichent en colonies au même endroit chaque année.

Photo : René Dumoulin

Ce comportement peut donc être exploité efficacement par la pose de nichoirs artificiels lorsque l’on souhaite redynamiser une colonie installée ou en développer une nouvelle. Dans le premier cas, la pose de nichoirs est réalisée sur le site d’une colonie existante en dehors de la période de nidification afin d’augmenter la disponibilité en nids et/ou de pallier au manque de boue (surtout les années de sécheresse). Dans le second cas, la pose de nichoirs artificiels est réalisée sur un site à proximité d’une colonie installée, agrémenté si nécessaire d’un dispositif de diffusion de chant (dit de « repasse »), afin d’attirer les hirondelles à investir un nouveau site de nidification. À Bruxelles, les deux stratégies ont été déployées avec succès depuis plusieurs années.

Hirondelle de fenêtre au nichoir. Photo Charles Carels

En 2002, les chiffres étaient au plus bas avec 33 couples nicheurs pour l’ensemble de Bruxelles. Depuis, et grâce aux aménagements de protection spécifiques, l’espèce s’installe davantage d’année en année. Cette année 2023 a été particulièrement bonne pour l’espèce. Le record de 2020 (393 nids) est dépassé avec 477 nids occupés sur l’ensemble des colonies (voir graphique ci-dessous).

Évolution annuelle du nombre de nids d’Hirondelles de fenêtre occupés de 1992 à 2023 par colonie. Les étiquettes sur le graphique indiquent le nombre total de nids occupés chaque année. Cliquez sur l’image pour l’agrandir.

Évolution annuelle et globale du nombre de nids d’Hirondelles de fenêtre dans la Région de Bruxelles-Capitale. Cliquez sur la tableau pour l’agrandir.

Actuellement, on compte 7 colonies actives en Région Bruxelles-Capitale ainsi qu’un certain nombre de colonies éteintes ou temporairement inactives.

Localisation des colonies d’Hirondelles de fenêtre à Bruxelles en 2023

Équipe volontaire en plein comptage de nids occupés dans la grande colonie de la meunerie Ceres ©Marius Pailhès

La plus grande colonie de Belgique en 2023 se trouve sur le bâtiment industriel de la meunerie Ceres (Groupe Soufflet) le long du canal. Il s’agit d’une colonie naturelle qui, après une année 2022 difficile, connaît une hausse de 120% avec 203 nids occupés. Non loin de là, sur l’autre rive, se trouve l’ancien bâtiment des brasseries Meudon, aujourd’hui occupé par l’entreprise Silo, sur lequel des nichoirs doubles ont été installés en 2021. Pour la première fois cette année, ils sont occupés par les hirondelles avec pas moins de 38 couples nicheurs estimés.

Enfin, dans les chiffres remarquables de ce grand cru 2023, la colonie Saint-Alix de Woluwe-Saint-Pierre bat également un record avec 61 nids occupés, résultant d’un probable déplacement de la fragile colonie de Mater Dei proche de là.

Enfin, ce printemps 2023, 12 nichoirs doubles ont été installés sur le bâtiment du Brass, jouxtant le marais Wiels et à proximité de la colonie du Charroi. Nous espérons y observer l’installation d’une nouvelle colonie d’ici quelques années.

L’Hirondelle de rivage

Blanche dessous et brunâtre au-dessus, cette espèce est la plus petit de nos Hirondelles. Elle évolue à proximité des cours d’eau qu’elle survole à la recherche d’insectes. Également grégaire pour se reproduire, elle s’installe en colonies dans les berges (naturelles ou artificielles) de ces cours d’eau, les carrières et les gros tas de matériaux meubles (sable, terre…).

Photo : René Dumoulin

Absente depuis plus de 40 ans, l’espèce a fait son grand retour à Bruxelles en 2021, probablement attirée par les caissons nichoirs installés plus tôt dans l’année. Deux couples ont niché dans les berges du canal au nord de Bruxelles. Quelques mois plus tard, la population bruxelloise compte au minimum 10 couples : 7 nids au sud du pont de Buda et 3 au nord, entre celui-ci et les caissons-nichoirs.

Le 26 juin 2023, une équipe embarque à bord du Bruocsella, un bateau mis à notre disposition par le Port de Bruxelles. Depuis l’eau, il est pus facile d’observer les cavités réhabilitées dans la berge pour accueillir les couples nicheurs. Lors de cet inventaire, 35 couples nicheurs certains ont été dénombrés, soit un taux d’occupation de près de 50% (35 cavités occupées/72 cavités potentielles). C’est donc trois fois plus qu’en 2021 ! La numérotation des cavités ainsi que l’attention toute particulière des gestionnaires pour cette espèce le long du canal, facilite davantage le suivi et la protection de l’Hirondelle de rivage à Bruxelles.

Ces deux exemples démontrent encore une fois que des actions ciblées et réfléchies permettent de favoriser le retour de certaines espèces. En travaillant à leur laisser une place, ces Hirondelles s’épanouissent facilement dans le décor de la ville pour le plaisir de tous et toutes.

Remerciements

Merci à tous les services et partenaires (Escaut sans frontières, Le Port de Bruxelles, Bruxelles Environnement, Nos Pilifs (et la fondation Pairi Daiza qui les a soutenus), Le SILO – Meudon, La meunerie Ceres, Le Brass, Natuurpunt Brussel, Natagora) qui rendent cette belle collaboration possible et fructueuse ainsi qu’à nos réseaux de volontaires (Charles Carels et tout le GT Hirondelles, Aves Bruxelles), toujours présents et investis dans la cause de la biodiversité en ville.

Résultats des comptages d’Hirondelles de fenêtre à Namur en 2021.

Photo : Robin Gailly

Notre section Aves Namur est active depuis de nombreuses années dans le recensement des Hirondelles de fenêtre Delichon urbicum nichant à Namur. De nombreux observateurs parcourent régulièrement les rues de la ville pour y dénombrer les nids dans les colonies.

Le recensement de 2021 vient compléter la série de comptages entamée en 1990 (1982 dans la “Corbeille”) et permet de visualiser l’évolution des populations dans les 16 km² de l’entité. Avec des résultats précis, il est aussi possible de comparer l’abondance de nids dans les anciennes communes.

Malgré un déclin important du nombre de nids et de colonies depuis 1990, de nouvelles tendances positives sont observées à certains endroits. Cela montre que des actions de sensibilisation et de protection directe (pose de nichoirs) permettent parfois d’inverser les tendances. Pour ce volet, Aves Namur peut aussi compter sur le dynamisme des volontaires de la Régionale Natagora Cœur de Wallonie.

Les résultats :

L’ensemble des résultats est disponible dans le rapport en cliquant sur ce lien.

Globalement, nous retenons que la situation en 2021 (871 nids) est toujours nettement inférieure à ce qui était observé en 1990 (1.600 nids). Mais qu’une amélioration globale semble se marquer depuis 2016 (756 nids, année du record minimum). Le nombre de colonies a également augmenté ces cinq dernières années.

Nombre de nids d’Hirondelles de fenêtre à Namur, selon le type d’habitat.

Ce sont surtout les nids dans les milieux urbains qui ont augmenté. La “Corbeille” compte en 2021 82 nids en 18 colonies, bien mieux que les 13 nids en 8 colonies de 2016 ! Mais le déclin continue à Jambes.

Localisation des colonies d’Hirondelles de fenêtre à Namur en 2016 (comptages Aves-Namur)

Localisation des colonies d’Hirondelles de fenêtre à Namur en 2021 (comptages Aves-Namur)

Conclusions :

Ces résultats sont encourageants, malgré le déclin à long terme un changement de tendance semble s’amorcer. Les actions de communication, de sensibilisation et de conservation menées de concert par la section Aves Namur et la Régionale Natagora Cœur de Wallonie portent leurs fruits. De quoi motiver les participants à la prochaine enquête ! Nous remercions d’ailleurs les observateurs qui ont cherché les nids d’hirondelles dans les différentes entités namuroises. Leurs noms se trouvent dans le rapport complet. Sans oublier tous ceux qui les protègent en plaçant des nids et en contactant les propriétaires de bâtiments occupés par des nids.

Photo : Thierry Gridlet

Rendez possible les comptages hivernaux des oiseaux d'eau ... au Rwanda !

Ce qui m’a toujours semblé particulièrement enthousiasmant avec les Dénombrements Hivernaux des Oiseaux d’Eau, c’est qu’il s’agit de l’opération de suivi des oiseaux la plus universelle. Partout, au même moment, des milliers d’ornithologues, amateurs ou pros, sortent leurs jumelles et comptent canards, limicoles et compagnie sur toutes les zones humides de la planète. Il n’y a qu’à voir la panoplie des logos des associations qui coordonnent ces comptages pour s’en convaincre.

Chez nous, ce comptage mené depuis près de 60 ans permet de suivre en détail l’évolution des populations hivernantes, de vérifier comment évolue la capacité d’accueil de nos étangs et rivières. Globalement, grâce à la consolidation de tous ces comptages, Wetlands International, l’ONG internationale qui chapeaute le tout, peut fournir des estimations d’effectifs et des tendances de population pour de nombreuses espèces d’oiseau d’eau. Pour s’assurer qu’un maximum de zones humides partout dans le monde soit couvert, Wetlands encourage la solidarité entre organisations. Aves, pôle ornithologique de Natagora, a ainsi été sollicité pour aider nos collègues du Rwanda à pouvoir mener à bien les recensements cet hiver. C’est pourquoi, à notre tour, nous encourageons votre générosité d’une manière un peu inhabituelle pour Natagora.

Le Canard à bec jaune, une espèce dont la population est-africaine est estimée à 20 à 60.000 individus mais dont la tendance des populations est indéterminée (photo Claudien Nsabagasani)

Le Canard à bec jaune, une espèce dont la population est africaine est estimée à 20 à 60.000 individus, mais dont la tendance des populations est indéterminée (photo Claudien Nsabagasani)

Vous qui admirez les oiseaux sur nos plans d’eau, et qui vous sentez concernés par la conservation des zones humides en dehors de l’Europe, pourquoi ne pas aider directement les ornithologues rwandais à réaliser ces comptages ? Ce don exceptionnel sera directement utilisé pour organiser ces inventaires et promouvoir les sciences participatives sur place. Nous devrions pour cela rassembler la somme de 2.500 €, qui permettrait d’organiser des formations, de prêter le matériel et surtout de financer les déplacements des équipes depuis les différentes villes du Rwanda vers les différentes zones humides prospectées.

Voici ce que nous écrit Claudien Nsabagasani, le coordinateur de ces comptages à Kigali:

Les marais de Rugezi, au nord du Rwanda, seront inventoriés par cette opération.

Les marais de Rugezi, au nord du Rwanda, seront inventoriés par cette opération.

Le dernier comptage des oiseaux d’eau au Rwanda remonte à 2016. Cette année, grâce au soutien d’Aves-Natagora, nous souhaitons revitaliser le comptage sur six sites de grandes importances pour la biodiversité (classés Ramsar ou Important Bird Areas). Avec ces inventaires, nous souhaitons relancer sur le long terme le monitoring des zones humides et de leurs oiseaux dans notre pays. Nous collecterons aussi des données sur les habitats et les problèmes de conservation rencontrés. Les recenseurs seront formés et les données récoltées alimenteront les différents portails de données (GBIF, BirdLife, Wetlands…). Les informations récoltées permettront d’orienter les mesures de conservation de la biodiversité, dans le cadre des différentes conventions internationales (AEWA, Ramsar, CBD…) avec le Gouvernement du Rwanda.

Les comptages seront menés en janvier-février 2021 en ligne avec les comptages internationaux des oiseaux d’eau (African-Eurasian Waterbird Census). Ces comptages seront menés depuis les rives, mais aussi à partir de bateaux ou de canoés quand le milieu le nécessite. Les informations standardisées relatives aux pressions et aux menaces sur les Important Bird Areas seront aussi collectées par la même occasion.

Les comptages 2021 des oiseaux d’eau au Rwanda seront financés avec la contribution d’Aves-Natagora, coordonnés par Birding and Educational Tours en collaboration avec différentes institutions académiques (CoEB), des agences gouvernementales (REMA, RDB et a ville de Kigali) et les associations basées au Rwanda (RWCA, ARCOS, Nature Rwanda, WCS, IUCN).

Cette année, nous ne pouvons pas voyager à cause de la pandémie… Cette solidarité entre ornithologues est un peu une manière indirecte de le faire, car nous vous tiendrons bien sûr informés des résultats de cette opération !

Voici le lien vers la page spécifique pour faire un don pour ce projet. N’oubliez pas que jusqu’à la fin de cette année, les dons de 40€ ou plus sont déductibles à 60% (au lieu de 45% habituellement) !

Un tout grand merci d’avance et bonnes fêtes de fin d’année… autant que faire se peut !

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