Nos projets de recherche

La phénologie des oiseaux en Wallonie: ce que nous apprennent les listes complètes d'observations

Depuis quelques années, nous vous invitons à prendre l’habitude de faire le plus souvent possible une liste de toutes les espèces que vous pouviez observer au cours d’une sortie ornitho. C’est ce que nous appelons le “suivi permanent de l’avifaune”. Prendre l’habitude d’encoder toutes les espèces, et pas seulement les observations les plus remarquables est une vieille habitude dans certains pays. Observations.be (et ses applications mobiles associées) permettent de faire cela très facilement. Alain Paquet a réalisé plusieurs tutoriels pour vous permettre de vous familiariser avec cette approche (voir en fin de page).

Dans cet article, nous allons détailler les premiers enseignements offerts par ces listes complètes, que de plus en plus d’ornithologues collectent en Wallonie. Nous pouvons en effet commencer à analyser la “phénologie” des espèces, c’est-à-dire les variations des phénomènes périodiques de la vie des oiseaux au cours d’une année (retour de migration, nidification, mue, départ en migration…). Pour cela, à partir des listes, nous réalisons des graphes montrant la variation au cours de l’année de la fréquence de détection d’une espèce parmi toutes les listes faites. En gros, vous pouvez voir cette fréquence (% des listes complètes) comme la probabilité d’observer l’espèce au cours d’une sortie ornitho classique (une heure ou deux), réalisée au hasard en Wallonie, à ce moment de l'année. L’image suivante vous donne une explication détaillée d’un de ces graphes phénologiques, basée sur l’Hirondelle rustique et les trois dernières années (2020 n’est pas encore terminée au moment d’écrire ce billet).

interpretation_graphe_frequence_annuel.jpg

Maintenant que vous avez compris le principe, examinons la phénologie de quelques espèces communes. Ici, nous allons montrer chaque fois des paires d’espèces proches, mais à la phénologie bien différente. Nous espérons que ces exemples vous donneront vous aussi l’envie de contribuer à ce suivi permanent de l’avifaune, c’est d’ailleurs très addictif sur le terrain !

Commençons par les deux petites grives de nos régions :

grivemusicienne.jpg
grivemauvis.jpg

Instructifs comme différences n’est-ce pas ? Ces graphes posent aussi des questions, comme les explications (météorologiques ?) qui se cachent derrière les variations interannuelles, comme le retour tardif des grives musiciennes en 2018 comparé à 2019 et 2020… Continuons avec un autre couple de nicheurs/hivernants, nos deux pinsons.

pinsonsdesarbres.jpg
pinsondunord.jpg

Avec ces quelques exemples que nous complèterons bientôt par d’autres sur ce blog, nous espérons que vous percevez mieux l’intérêt de faire des listes lors de vos sorties ornithos! Pour le faire correctement, voici les tutoriels réalisés pour faciliter vos “premières fois”.

Tout d’abord, une explication sur ce qu’on entend par liste complète et “suivi permanent de l’avifaune”

Enjoy the videos and music you love, upload original content, and share it all with friends, family, and the world on YouTube.

Ensuite une explication sur comment faire une liste complète sur Observations.be…

Alain Paquet vous présente comment créer des listes permanentes dans observations.be

Ensuite, une explication sur l’encodage d’une liste sur le terrain via iObs (pour iPhone):

Alain Paquet vous présente comment faire des listes complètes d'espèces avec iObs

Et enfin, la version pour ObsMapp:

Alain Paquet vous présente comment faire une liste complète d'espèces avec ObsMapp

Merci et bonnes observations !

Comment observer les oiseaux en période de confinement ? En participant au nouveau « Suivi permanent de l’avifaune » !

Clipboard01.jpg

Nous vivons une période de pandémie exceptionnelle à Coronavirus, des mesures de confinement strictes sont en application, elles bouleversent nos habitudes et notre façon de profiter de la nature et il s’agit bien évidement pour nous tous de les respecter scrupuleusement. Aves – Natagora lance ce printemps un nouveau mode de collecte d’observations ornithologiques : le « Suivi permanent de l’avifaune ». Par une coïncidence aussi fortuite que malheureuse, ce mode de suivi est parfaitement adapté au confinement actuel. Chacun peut y contribuer simplement de son jardin, de son quartier ou pendant les brèves promenades quotidiennes à proximité immédiate de son domicile comme définies par les mesures de confinement. Ces mesures peuvent d’ailleurs encore évoluer, il sera de l’intérêt de toutes et tous de s’adapter à nouveau.

Qu’est-ce le « Suivi permanent » ?

Le suivi permanent est déjà très répandu dans de nombreux pays où l’ornithologie est bien développée car le principe et la méthodologie sont simples et offrent des possibilités d’analyse très puissantes. Il s’agit de faire des listes complètes d’observations et de les enregistrer d’une manière particulière sur Observations.be. Ces listes comprennent quelques informations précieuses pour les analyses comme l’heure de début des observations et l’heure de fin. Indirectement, elles permettent aussi de connaître les espèces non détectées par l’observateur. Elles se font toute l’année et en tout lieu. L’objectif de ce nouveau type de suivi est de combler les lacunes liées aux observations isolées et de compléter les informations données par les programmes de monitoring habituels :

1. Combler des lacunes en matière temporelle (été, hiver)

2. Réactivité et précision : détection des changements d’abondance à court terme, invasions, vagues de chaleur, épizooties (virus USUTU), phénologie…

3. Collecter des infos structurées sur les espèces absentes ou non détectées

4. Mesurer l’effort de recherche et l’intégrer dans les analyses des résultats

Sans compter que … c’est une activité amusante, on se prend très vite au jeu d’obtenir la liste d’espèces observées la plus longue, même depuis son jardin !

Exemple de ce que pourrait donner le suivi permanent de l’avifaune: ceci est un graphe montrant la fréquence du Pouillot véloce dans les listes complètes en Grande-Bretagne. En rouge: la courbe historique. En vert: la situation en cours en 2020. Le …

Exemple de ce que pourrait donner le suivi permanent de l’avifaune: ceci est un graphe montrant la fréquence du Pouillot véloce dans les listes complètes en Grande-Bretagne. En rouge: la courbe historique. En vert: la situation en cours en 2020. Le Pouillot véloce est légèrement en avance dans sa migration de retour. Source: BirdTrack, British Trust for Ornithology

Où et quand faire une liste complète en période de confinement ?

Dans votre jardin ou dans votre quartier (s’adapter si évolution des mesures de confinement), tout le temps, pendant les 4 saisons. De préférence au moment de la journée où on a de bonnes chances d’observer un maximum d’individus et d’espèces. En matinée (et parfois en fin de journée, en mai-juin p.ex.).

Que doit-on noter ?

Toutes les Espèces et si possible on comptabilise chaque individu observé (c’est mieux !). Si pas possible : on peut signaler qu’on n’a pas compté tous les individus. On enregistre la durée du comptage en précisant les heures de début et de fin.

Durée optimale ?

Les listes complètes peuvent se faire à point fixe ou pendant un parcours. En période de confinement, 15’ à 30’ suffisent pour un point fixe et 30’ à 45’ pour un transect (parcours). Il y a 3 façons de faire une liste complète : point fixe et transect sur le terrain avec un smartphone (applications ObsMapp et iObs) ou à la maison sur Observations.be

Intéressé ?

Nous vous invitons à découvrir ICI le Suivi permanent de l’avifaune et d’en comprendre étape par étape l’encodage des données. Dès la fin de la période de confinement, des formations seront données à la demande. Nous pouvons nous déplacer vers les Régionales Natagora et les Sections Aves.

Voir les tutoriels vidéo :

Bonnes observations et bon courage à tous!

Quinze ans d’évolution rapide de la répartition des oiseaux en Wallonie

Entre 2001 et 2007, l’Atlas des oiseaux nicheurs de Wallonie avait mobilisé des centaines d’ornithologues sur le terrain pour cartographier la répartition et l’abondance des toutes les espèces en Wallonie. L’ouvrage publié début 2011 reste la référence pour l’ornithologie régionale. Quinze ans après, afin de contribuer à l’Atlas des Oiseaux nicheurs d’Europe (EBBA2), une partie des échantillonnages de terrain ont été répétés. Plus de 1.200 carrés d’1 km² à travers la Wallonie ont ainsi fait l’objet d’une prospection 2015 et 2018. Grâce à la collaboration de 140 ornithologues amateurs, dans chacun de ces carrés, les oiseaux nicheurs ont été comptés pendant deux fois une heure, en début et en fin de printemps. Cela nous fournit une formidable base de comparaison à 10-15 ans d’intervalle ! Des analyses préliminaires avaient été diffusés sur ce blog en 2016 et dans un rapport intermédiaire en 2017. Plus récemment, Thomas Coppée, de l’ULg-Gembloux-Agro-Biotech, a utilisé ces données pour dessiner des cartes de répartition à haute résolution, comparant les deux périodes… et elles sont désormais publiées en ligne. Voici quelques explications…

Au terme de la double heure de comptage dans chaque carré, on obtient le nombre d’individus détectés de chaque espèce (le maximum des deux passages est retenu). Ces comptages concernent donc 1.200 carrés (soit 7 % de la surface wallonne). Afin d’obtenir une extrapolation pour l’ensemble de la Wallonie (environ 16.500 km²), une modélisation spatiale a été réalisée, espèces par espèce. Un modèle mathématique “s’entraîne” d’abord en croisant les données d’oiseaux et l’environnement quantifié par une série de variables descriptives. Ces variables sont tirées d’une couche d’informations cartographiques détaillées appelées ECOTOPES, élaborée par le projet LifeWatch Europe. Une fois établie la fonction mathématique reliant le nombre d’oiseaux avec les variables environnementales, on peut l‘appliquer à l’ensemble des carrés en Wallonie. En répétant la même opération pour les données de l’Atlas 2001-2007 et les variables environnementales de la même période, il est dès lors possible de comparer l’évolution des aires et des densités régionales à quinzaine d’années d’intervalle en Wallonie.

© Vincent Rasson

© Vincent Rasson

Des cartes pour toute une série d’espèces sont maintenant visibles en ligne, sur le portail du Lifewatch. En cliquant sur l’onglet “2006” ou “2015”, après avoir choisi l’espèce, vous pourrez visualiser vous-même les différences de densité entre les deux périodes.

Par exemple, l’évolution du Moineau friquet (photo ci-dessus et cartes ci-dessous) est fort préoccupante: on observe une diminution de 77% des effectifs et très forte contraction de l’aire de répartition au cours de la dernière décennie. Ce déclin est aussi confirmé par les relevés indépendants réalisés dans le cadre du suivi des oiseaux communs en Wallonie (SOCWAL).

friquet_all.png

Bonnes découvertes des cartes et merci à tous les observateurs et à l’équipe de LifeWatch pour cette belle collaboration ! Plus d’information bientôt dans la Revue Aves…