Quinze ans d’évolution rapide de la répartition des oiseaux en Wallonie

Entre 2001 et 2007, l’Atlas des oiseaux nicheurs de Wallonie avait mobilisé des centaines d’ornithologues sur le terrain pour cartographier la répartition et l’abondance des toutes les espèces en Wallonie. L’ouvrage publié début 2011 reste la référence pour l’ornithologie régionale. Quinze ans après, afin de contribuer à l’Atlas des Oiseaux nicheurs d’Europe (EBBA2), une partie des échantillonnages de terrain ont été répétés. Plus de 1.200 carrés d’1 km² à travers la Wallonie ont ainsi fait l’objet d’une prospection 2015 et 2018. Grâce à la collaboration de 140 ornithologues amateurs, dans chacun de ces carrés, les oiseaux nicheurs ont été comptés pendant deux fois une heure, en début et en fin de printemps. Cela nous fournit une formidable base de comparaison à 10-15 ans d’intervalle ! Des analyses préliminaires avaient été diffusés sur ce blog en 2016 et dans un rapport intermédiaire en 2017. Plus récemment, Thomas Coppée, de l’ULg-Gembloux-Agro-Biotech, a utilisé ces données pour dessiner des cartes de répartition à haute résolution, comparant les deux périodes… et elles sont désormais publiées en ligne. Voici quelques explications…

Au terme de la double heure de comptage dans chaque carré, on obtient le nombre d’individus détectés de chaque espèce (le maximum des deux passages est retenu). Ces comptages concernent donc 1.200 carrés (soit 7 % de la surface wallonne). Afin d’obtenir une extrapolation pour l’ensemble de la Wallonie (environ 16.500 km²), une modélisation spatiale a été réalisée, espèces par espèce. Un modèle mathématique “s’entraîne” d’abord en croisant les données d’oiseaux et l’environnement quantifié par une série de variables descriptives. Ces variables sont tirées d’une couche d’informations cartographiques détaillées appelées ECOTOPES, élaborée par le projet LifeWatch Europe. Une fois établie la fonction mathématique reliant le nombre d’oiseaux avec les variables environnementales, on peut l‘appliquer à l’ensemble des carrés en Wallonie. En répétant la même opération pour les données de l’Atlas 2001-2007 et les variables environnementales de la même période, il est dès lors possible de comparer l’évolution des aires et des densités régionales à quinzaine d’années d’intervalle en Wallonie.

© Vincent Rasson

© Vincent Rasson

Des cartes pour toute une série d’espèces sont maintenant visibles en ligne, sur le portail du Lifewatch. En cliquant sur l’onglet “2006” ou “2015”, après avoir choisi l’espèce, vous pourrez visualiser vous-même les différences de densité entre les deux périodes.

Par exemple, l’évolution du Moineau friquet (photo ci-dessus et cartes ci-dessous) est fort préoccupante: on observe une diminution de 77% des effectifs et très forte contraction de l’aire de répartition au cours de la dernière décennie. Ce déclin est aussi confirmé par les relevés indépendants réalisés dans le cadre du suivi des oiseaux communs en Wallonie (SOCWAL).

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Bonnes découvertes des cartes et merci à tous les observateurs et à l’équipe de LifeWatch pour cette belle collaboration ! Plus d’information bientôt dans la Revue Aves…

Observations.be 2.0 : du nouveau pour votre portail naturaliste

Après plus de 11 ans d’existence, Observations.be, la plateforme de gestion de données naturalistes de Natagora, fait peau neuve.

Dès son lancement, le portail a révolutionné la manière dont de nombreux naturalistes gèrent leurs données de terrain. Beaucoup l’utilisent comme leur carnet personnel digital, surtout depuis que des applications pour smartphone (ObsMapp et iObs) permettent de saisir les observations directement sur le terrain. Le site web est consulté quotidiennement par des milliers de personnes, curieuses de suivre en direct l’actualité de la nature ou d’admirer les photos qui y sont déposées. Les quelques 36 millions d’observations concernant environ 22.000 espèces en Belgique sont de plus en plus utilisées pour la recherche scientifique ou la conservation de la nature. Un bilan de la première décennie de fonctionnement d’Observations.be avait été présenté lors d’une journée spéciale des observateurs fin 2018 (présentation disponible ici).

Observations.be et les autres sites de la même famille sont gérés par une Fondation, “Observation International”, associant Natagora, Natuurpunt mais aussi des institutions reconnues mondialement comme Naturalis, le centre de recherche sur la biodiversité basé à Leiden (NL). Les observations de nature du monde entier peuvent être encodées sur le site-frère Observation.org (rappelons d’ailleurs que votre compte utilisateur - login/mot de passe - d’Observations.be y est valable également).

Il y a quelques mois, en commençant par le portail historique Waarneming.nl, puis Waarnemingen.be, une grande refonte du système a été entamée et s’étend désormais à notre portail francophone. Cette reprogrammation est nécessaire pour des questions d’optimalisation informatique et de mise à niveau du système, mais elle permet aussi d’améliorer le look et les fonctions disponibles pour les utilisateurs. En voici quelques exemples:

  • Intégration plus facile de l’encodage par photo, couplé au système d’identification automatique “ObsIdentify”. Ce système de reconnaissance par intelligence artificielle donne des résultats vraiment étonnants pour la détermination de nombreuses espèces dans le Benelux. Mettez-le à l’épreuve !

  • Design compatible avec les téléphones portables et les tablettes

  • Amélioration des fonctions d’exploration des dernières observations par localité ou par proximité à partir d’un point

  • Visualisation cartographique nettement améliorée

  • Intégration de “projets” d’inventaire particulier (avec protocole de terrain spécifique), en plus des observations courantes (nous y reviendrons !)

Le nouveau design de la page principale d’encodage d’Observations.be

Le nouveau design de la page principale d’encodage d’Observations.be

Bien entendu, l’utilisateur de longue date d’Observations.be sera peut-être un peu perdu au début, avec un changement de cet importance. De plus, certaines fonctions (notamment certaines explorations statistiques des données) ne sont pas encore totalement transférées. Rassurez-vous, tant que l’adaptation n’est pas complète, vous aurez toujours accès à tout cela à partir du menu “Ancien Site”.

La transition est aussi l’occasion pour chaque observateur de repréciser les conditions d’utilisations des données qu’il transmet. Petit à petit, la famille Observation.org se dirige, à l’instar d’autres systèmes comme iNaturalist ou eBirds, vers le partage en “accès libre et ouvert” des données sur la biodiversité (notamment via le GBIF), mais c’est l’utilisateur qui garde la main. Nous vous recommandons dès lors de favoriser l’utilisation maximale des données pour la protection de la nature des données que vous transmettez.

Bonne découverte de votre nouveau portail et surtout… bonnes observations !

Pour toute question : info@observations.be

La revue AVES vient de paraître : un numéro spécial migration (éditorial) !

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Beaucoup d’entre nous ont des souvenirs lumineux de grandes journées de migration, où la quantité d’oiseaux qui défilent dans nos cieux impressionne autant que leur diversité… De nombreux passionnés attendent le spectacle annuel du ballet des espèces en transhumance. Avant même que la saison de reproduction soit totalement terminée, dès le cœur de l’été, les migrateurs les plus hâtifs font route vers le sud. Peu à peu, avec l’automne, les vols deviennent de plus en plus visibles et les espèces se succèdent, au moins jusqu’en novembre, où les énormes groupes des Pigeons ramiers et les passages concentrés des Grues cendrées constituent un véritable cadeau pour les yeux avant le calme relatif de l’hiver.

Pour spectaculaire qu’elle soit, la migration automnale n’est pas un phénomène qui s’observe aisément par tout un chacun. Il n’est pas si simple d’identifier les oiseaux qui passent en trombe vers leurs quartiers d’hiver. Les plumages ne peuvent que rarement être détaillés et il faut se fier à des critères spécifiques : allure en vol, silhouette, cris de contact... C’est pour faciliter l’accès du plus grand nombre à ce spectacle éternellement renouvelé que nous avons décidé de publier le numéro double exceptionnel que vous tenez entre les mains, différent des volumes habituels à plusieurs égards.

Il s’agit de l’aboutissement d’un projet de longue haleine, né d’une heureuse initiative de quatre ornithos passionnés d’observation de la migration. Les auteurs de ce numéro spécial observent le passage automnal depuis des années, postés sur les collines hennuyères, les cols pyrénéens ou les crêtes ardennaises. Ils ont voulu rassembler l’expérience acquise sur le terrain pour en faire profiter le plus grand nombre.

Ainsi, le contenu traditionnel d’articles présentant des résultats originaux fait place à un guide d’identification spécialisé sur les oiseaux observables en migration active, dans nos régions.

Il offre aussi une restitution des suivis déjà menés en Wallonie par les passionnés de migration. Vous trouverez ainsi des graphes et des indications basés sur les séances de migration encodées dans le portail trektellen.org, qui permettront de connaître, pour chaque espèce, la période préférentielle de passage, les effectifs observés et leur fréquence.

Devant la masse d’informations à traiter, il a fallu faire des choix : ce numéro spécial se focalise sur les espèces visibles chez nous en migration active diurne, pendant la période postnuptiale, la plus spectaculaire dans nos régions.

Le Comité de la revue Aves tient à remercier toutes les personnes impliquées dans ce travail : les observateurs encodant leurs données de suivis migratoires, les photographes, les relecteurs et bien entendu notre quatuor « de choc » sans lequel ce volume n’existerait pas !

Bonne lecture et surtout… excellentes observations !

Lien vers toutes les tables des matières et 50 ans d’articles en libre accès: cliquer ici.

Pourquoi ne pas publier votre recherche en ornithologie dans la Revue Aves ? Consultez les instructions aux auteurs et contactez-nous.