L'hivernage du Grand Cormoran en Wallonie et à Bruxelles

Le Grand Cormoran n'est peut-être pas l'oiseau qui fait le plus rêver les ornithologues.

Et pourtant, c'est une espèce fantastique qui, au milieu des turpitudes de notre environnement, semble tirer son épingle du jeu.

Depuis 30 ans, c'est un hivernant régulier en Wallonie et à Bruxelles et ses effectifs sont suivis de près par des dizaines de volontaires, coordonnés par Aves. Deux fois par hiver, tous les dortoirs nocturnes sont recensés simultanément. Couplé aux résultats des recensements d'oiseaux d'eau, ce suivi permet de comprendre comment le cormoran s'est adapté à nos milieux humides. Et comment les variations de son effectif reflètent les changements du milieu naturel, aussi sous la surface de nos eaux tranquilles.

Vous voulez en savoir plus ? Découvrir ce que l’on sait de l’évolution de l’espèce en lien avec l’écosystème Meuse ? L’effet des dérogations permettant le tir de cet oiseau parfois considéré comme “indésirable” ?

Regardez ce Webinaire d’environ une heure qui explique tout cela en détail. Cet exposé a été présenté le 19 novembre 2020 dans le cadre des “Webinaires du Département Études” de Natagora.

Le dortoir de cormoran de l’étang du Fraity (Roly). Photo: O. Colinet

Le dortoir de cormoran de l’étang du Fraity (Roly). Photo: O. Colinet

Pour poursuivre ce suivi, nous avons besoin de vous ! La détection des nouveaux dortoirs du Grand Cormoran partout en Wallonie et à Bruxelles est toujours utile, car certains sont abandonnés et d’autres apparaissent.

Comment reconnaitre un dortoir ? Il s’agit d’un site où les Grands Cormorans se rassemblent pour passer la nuit, surtout en automne et en hiver. Il faut s’assurer que les cormorans y sont toujours présents en fin d’après-midi ! Certains sites ne sont en effet utilisés qu’en journée (“reposoir”) et les cormorans les quittent pour rejoindre le vrai dortoir. Les dortoirs sont toujours des arbres en bordure d’eau libre (rives d’un étang, arbres en bord de rivière…), avec un dérangement limité (le dortoir idéal est sur une île). Souvent, les arbres sont blanchis de fientes. Les dortoirs le long de Lesse, de l’Ourthe et de la Semois sont particulièrement utiles à rechercher, car ils y sont très mobiles… Tous les détails sont sur ce lien. La date du prochain comptage coordonné est le 16 janvier 2021.

Pour encoder un dortoir sur Observations.be, même pour une autre espèce et à n’importe quelle date, voici comment faire (sur le formulaire d’encodage):

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Bonnes observations hivernales !

Une migration 2020 exceptionnelle ?

Alouette lulu en migration à Xhoris. Photo : Jean-Marie Poncelet

Alouette lulu en migration à Xhoris. Photo : Jean-Marie Poncelet

La migration bat son plein, et depuis une dizaine de jours une partie de la Wallonie est survolée par un flux impressionnant d’oiseaux. Ce sont surtout les pinsons des arbres et les pigeons ramiers qui assurent le spectacle. C’est assez habituel en cette saison, et c’est un vrai plaisir à observer ! Mais en regardant les chiffres, il me semble que la quantité d’oiseaux cette année soit exceptionnelle, notamment chez le pinson des arbres ! Les données du portail trektellen.org montrent que ce flux important concerne surtout la frange ouest de l’Ardenne. Les ornithos fidèles au poste à Xhoris (province de Liège) ont ainsi compté 247 000 oiseaux migrateurs ces deux dernières semaines, dont 158 000 pinsons ! En utilisant les outils d’analyse du site trektellen, on voit que le passage de cette espèce, ainsi que celui de l’alouette lulu par exemple, sont nettement supérieurs à la moyenne des 10 dernières années.

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Migration du Pinson des arbres et de l’Alouette lulu sur le site de suivi de la migration de Xhoris (bordure ouest de l’Ardenne). Les observations de cet automne jusqu’au 14 octobre 2020 sont en rouge tandis que les bâtonnets bleus indiquent le flux…

Migration du Pinson des arbres et de l’Alouette lulu sur le site de suivi de la migration de Xhoris (bordure ouest de l’Ardenne). Les observations de cet automne jusqu’au 14 octobre 2020 sont en rouge tandis que les bâtonnets bleus indiquent le flux moyen pour les dix années précédentes (2009-2019).

Quelle est l’ampleur géographique de ce flux exceptionnel ? La carte suivante, toujours issue du site trektellen.nl, montre le nombre de pinsons des arbres comptés sur les sites de suivi belges et néerlandais durant les deux premières semaines d’octobre. On voit assez clairement que le passage exceptionnel détecté à Xhoris a concerné un couloir relativement étroit, comprenant aussi les sites de suivi de Ninane, près de Liège, et de Karstraat (Wittem), au sud-est des Pays-Bas. Les limites de ce couloir ne sont pas faciles à dessiner précisément, mais les passages un peu ou nettement plus faibles notés sur certains sites bien suivis comme Flémalle, Honnay, ou Cielle permettent d’avancer que ce couloir s’étalait sur une douzaine de kilomètres de large.

Observations de pinsons des arbres sur les sites de suivi migratoires de la plateforme www.trektellen.org entre le 01/10/2020 et le 14/10/2020 (source : www.trektellen.org).

Observations de pinsons des arbres sur les sites de suivi migratoires de la plateforme www.trektellen.org entre le 01/10/2020 et le 14/10/2020 (source : www.trektellen.org).

Peut-on identifier l’origine géographique de ces pinsons ? Le caractère étroit du couloir et son orientation suggèrent fortement que ces oiseaux proviennent de Scandinavie et ont été concentrés au niveau du goulot d’étranglement de Falsterbo, au sud de la Suède. Les passages très importants comptés sur ce site début octobre correspondent très bien à la « vague » observée ensuite en Wallonie (voir les résultats des comptages au jour le jour sur ce lien). Le ciel wallon n’a donc rien n’a envier aux cols pyrénéens ces derniers jours, profitons-en ! Cette belle migration semble indiquer que la reproduction de plusieurs espèces a été très bonne cette année dans le nord de l’Europe au moins. Il faudra faire le bilan en fin de saison !

La phénologie des oiseaux en Wallonie: ce que nous apprennent les listes complètes d'observations

Depuis quelques années, nous vous invitons à prendre l’habitude de faire le plus souvent possible une liste de toutes les espèces que vous pouviez observer au cours d’une sortie ornitho. C’est ce que nous appelons le “suivi permanent de l’avifaune”. Prendre l’habitude d’encoder toutes les espèces, et pas seulement les observations les plus remarquables est une vieille habitude dans certains pays. Observations.be (et ses applications mobiles associées) permettent de faire cela très facilement. Alain Paquet a réalisé plusieurs tutoriels pour vous permettre de vous familiariser avec cette approche (voir en fin de page).

Dans cet article, nous allons détailler les premiers enseignements offerts par ces listes complètes, que de plus en plus d’ornithologues collectent en Wallonie. Nous pouvons en effet commencer à analyser la “phénologie” des espèces, c’est-à-dire les variations des phénomènes périodiques de la vie des oiseaux au cours d’une année (retour de migration, nidification, mue, départ en migration…). Pour cela, à partir des listes, nous réalisons des graphes montrant la variation au cours de l’année de la fréquence de détection d’une espèce parmi toutes les listes faites. En gros, vous pouvez voir cette fréquence (% des listes complètes) comme la probabilité d’observer l’espèce au cours d’une sortie ornitho classique (une heure ou deux), réalisée au hasard en Wallonie, à ce moment de l'année. L’image suivante vous donne une explication détaillée d’un de ces graphes phénologiques, basée sur l’Hirondelle rustique et les trois dernières années (2020 n’est pas encore terminée au moment d’écrire ce billet).

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Maintenant que vous avez compris le principe, examinons la phénologie de quelques espèces communes. Ici, nous allons montrer chaque fois des paires d’espèces proches, mais à la phénologie bien différente. Nous espérons que ces exemples vous donneront vous aussi l’envie de contribuer à ce suivi permanent de l’avifaune, c’est d’ailleurs très addictif sur le terrain !

Commençons par les deux petites grives de nos régions :

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Instructifs comme différences n’est-ce pas ? Ces graphes posent aussi des questions, comme les explications (météorologiques ?) qui se cachent derrière les variations interannuelles, comme le retour tardif des grives musiciennes en 2018 comparé à 2019 et 2020… Continuons avec un autre couple de nicheurs/hivernants, nos deux pinsons.

pinsonsdesarbres.jpg
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Avec ces quelques exemples que nous complèterons bientôt par d’autres sur ce blog, nous espérons que vous percevez mieux l’intérêt de faire des listes lors de vos sorties ornithos! Pour le faire correctement, voici les tutoriels réalisés pour faciliter vos “premières fois”.

Tout d’abord, une explication sur ce qu’on entend par liste complète et “suivi permanent de l’avifaune”

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Ensuite une explication sur comment faire une liste complète sur Observations.be…

Alain Paquet vous présente comment créer des listes permanentes dans observations.be

Ensuite, une explication sur l’encodage d’une liste sur le terrain via iObs (pour iPhone):

Alain Paquet vous présente comment faire des listes complètes d'espèces avec iObs

Et enfin, la version pour ObsMapp:

Alain Paquet vous présente comment faire une liste complète d'espèces avec ObsMapp

Merci et bonnes observations !